Fixer le prix du porc par contrat : Expériences à l’étranger et enseignements pour la France
Les contrats de commercialisation traduisent l’engagement de partenaires à fournir et à recevoir un bien ou un service, précisant les modes de livraison et de paiement. Ils leur permettent de se couvrir contre un risque de variation importante du prix, d’approvisionnement ou débouché, mais les exposent au risque qu’une des parties au contrat ne respecte pas ses engagements.
Au travers d’une étude et d’entretiens, les contrats de commercialisation des porcs existant en Europe, aux Etats-Unis et au Brésil ont été caractérisés par l’IFIP. Leur intérêt pour la production porcine française a été ensuite analysé.
En Europe, la commercialisation des porcs se fait essentiellement sur la base de prix négociés sur l’instant (spot). En Angleterre et en Italie cependant, 70 à 80% des animaux sont vendus via des contrats de 2 à 5 ans. Aux Etats-Unis, les contrats à livraison différée (exécution ultérieure de termes décidés à la signature du contrat) concernent 61% des porcs abattus. Ils peuvent être basés sur des prix fixes, sur des cotations officielles, pouvant être encadrées par des seuils, ou indexées sur un coût de revient estimé. Ces expériences étrangères montrent que les contrats permettent d’assurer un débouché régulier pour les porcs (Etats-Unis) ou de garantir une marge. Il s’agit également de répartir le risque de prix sur plusieurs outils (Angleterre) ou d’offrir la possibilité d’un prix plus élevé à des éleveurs en zone de faible densité porcine (Etats-Unis).
En France, s’il existe déjà à l’heure actuelle des contrats pour la commercialisation des produits agricoles, la vente des porcs charcutiers aux abatteurs repose essentiellement sur des ententes non contractuelles, des habitudes de fonctionnement.
La prédominance du système naisseur-engraisseur en France et la commercialisation très fréquente des porcs qui en résulte (de 1 fois/semaine à au moins 1 fois/mois), permettent un lissage des prix à court ou moyen terme, diminuant l’intérêt d’un contrat à prix fixe ou lissé. La standardisation des porcs les rend facilement interchangeables. La concentration géographique des acteurs et l’organisation de la filière porcine française limitent le risque de débouchés pour les éleveurs et d’approvisionnement pour les abatteurs. Le marché au cadran offre aux éleveurs une mode de fixation du prix clair et transparent. Cette référence bihebdomadaire est structurante pour le marché du porc en France. Jusqu’à présent, c’est plutôt au sein des filières différenciées à volumes de production restreints et à opérateurs peu nombreux, comme le porc biologique, que les opérateurs ont ressenti le besoin de contractualiser leurs échanges.
Cependant, les variations interannuelles des prix du porc et de l’aliment sont importantes, surtout pour l’aliment depuis 2007. Pour lisser le prix de vente des animaux et de l’aliment, on peut penser à des contrats longs à prix fixe. Mais face à la difficulté de mesurer précisément les effets négatifs de la volatilité sur les résultats économiques et au coût de mise en oeuvre des contrats, des simulations précises seraient nécessaires pour comparer leur intérêt à celui d’autres dispositifs (épargne mutualisée, provisions défiscalisées…).
Aussi, du fait de ses caractéristiques, le marché du porc en France n’utilise actuellement pas de contrats fixant le prix à l’avance. Mais face à des variations interannuelles de prix plus importantes, la question se pose de contrats de longue durée.
Contact : estelle.antoine@ifip.asso.fr