Perspectives des marchés des matières premières entrant dans l’alimentation animale : Evaluation des écarts de prix des formules alimentaires porcines en Union Européenne, aux Etats-Unis et au Brésil

L’impact des hausses récentes des prix des matières premières de l’alimentation animale a brutalement remis en lumière le lien entre ces marchés et la compétitivité de la production porcine. Cette étude se focalise sur le Brésil, les Etats-Unis et l’UE et effectue des projections sur les écarts de prix possibles de l’aliment en 2020, selon l’évolution des marchés agricoles. Les systèmes d’alimentation porcine dépendent de la disponibilité locale des matières premières. Sur le continent américain, le maïs et le soja sont à la base de l’alimentation grâce à une superposition des zones de production. En Europe, l’avantage du prix du blé en fait la céréale de base de l’alimentation animale, associée au tourteau de soja importé. L’introduction de tourteau de colza se renforce sous l’impulsion de la production de biodiesel. L’étude des écarts de prix des matières premières et de l’aliment porcin entre les trois bassins fait ressortir un avantage comparatif de 48 $/t en moyenne sur la dernière décennie pour les Etats-Unis et de 30 $/t pour le Brésil vis-à-vis de la Bretagne, celle-ci retirant néanmoins un avantage de la diversité de ses approvisionnements. Les marchés des matières premières et la formation des prix dépendent de nombreux facteurs de politiques agricole, commerciale, énergétique et dans le domaine des biotechnologies ainsi que des équilibres macroéconomiques (revenus, population, prix de l’énergie, parités monétaires). L’analyse de la flambée des prix entre 2006 et 2008 permet de comprendre les interactions entre ces facteurs et de définir quels éléments pourront jouer à moyen terme et faire varier les écarts de prix des matières premières entre bassins. Les modèles d’analyse économique réalisés par le Fapri, l’USDA ou l’OCDE établissent des projections des marchés agricoles sur la base d’hypothèses de stabilité relative de l’environnement économique et politique. Des critiques sur la représentativité des marchés peuvent être adressées à ces outils, qui définissent néanmoins quantitativement un état du marché sur la base d’hypothèses. Leurs résultats ont permis de définir une situation de référence des marchés à l’horizon 2020 sans rupture politique ou macroéconomique. Les projections relatives aux prix indiquent que les écarts de prix des formules alimentaires porcines, d’ici 10 ans, seraient plus réduits que par le passé (écart de 4 à 6 $/t). Quatre scénarios de rupture sont appliqués à cette situation de référence pour déterminer les écarts de prix de l’aliment en 2020 selon d’autres hypothèses. Les ruptures appliquées sont volontairement fortes pour isoler les grands facteurs de changement des marchés agricoles : libéralisation (ouverture des frontières et réduction des soutiens), développement des investissements dans la recherche et le développement agricoles dans l’UE et le bassin de la Mer Noire, renforcement des contraintes environnementales et des exigences des consommateurs, investissements dans les infrastructures de transport au Brésil. La Bretagne renforcerait sa compétitivité dans le cas d’investissements dans la productivité des matières premières, cela reposant sur une croissance économique soutenue et une acceptation de certaines évolutions par la société, notamment sur les biotechnologies. Une libéralisation de l’agriculture renforcerait la convergence des prix de l’aliment entre les trois bassins. La situation la plus défavorable à la compétitivité coût des filières françaises serait celle d’un accroissement des préoccupations environnementales et de santé publique. La situation réelle des coûts relatifs de l’aliment porcin combinera en 2020 plusieurs de ces hypothèses. Les prix des formules alimentaires devraient se rapprocher entre les trois bassins par rapport aux écarts observés entre 2000 et 2009. La rentabilité des filières porcines européennes dépendra alors de la cohérence des choix politiques et de société entre les produits végétaux et animaux.