L'excellence technique en élevage de porcs en France. Facteurs de réussite et conséquences économiques
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Auteurs :
Roguet C, Badouard B, Rieu M, Briant C
La rentabilité et la compétitivité de l’élevage de porcs reposent principalement, outre l’accès à des facteurs de production les moins coûteux possibles (aliment, travail, bâtiment, foncier, capitaux), sur l’obtention de performances techniques les meilleures qui permettent de réduire les charges fixes par unité produite et d’augmenter les produits.
L’analyse des performances techniques à l’échelle nationale et les comparaisons internationales mettent en évidence certes un progrès technique continu dans tous les pays, mais aussi une dispersion importante entre élevages. De plus, ces dernières années, les performances s’améliorent plus rapidement dans d’autres pays (Danemark, Pays-Bas, Allemagne notamment) qu’en France. Ces évolutions différenciées trouvent leur origine dans un ensemble de facteurs : une restructuration très dynamique des élevages dans le nord de l’Europe avec sélection des plus performants (les seuls à obtenir des financements pour développer leur activité), un agrandissement et une spécialisation des structures qui s’accompagnent d’une modernisation de leurs bâtiments, d’une amélioration du sanitaire et des conditions de travail, des choix génétiques…
Face à ce défi de compétitivité, il faut se demander quel est le niveau technique des meilleurs élevages français, comment ils y sont parvenus, quels sont leurs pratiques et leurs facteurs de réussite. On peut aussi se demander si la dispersion des résultats entre élevages constitue réellement une marge de progrès.
La présente étude a été réalisée pour établir un diagnostic précis de l’excellence technique dans les élevages de porcs en France en 2010, identifier les facteurs et trajectoires de réussite et évaluer le bénéfice économique de la performance technique. Elle repose principalement sur une analyse statistique poussée des données individuelles de performances techniques, complétées par le recueil d’informations par enquête postale et sur l’analyse économique et financière des résultats des exploitations.
Le rapport comprend quatre parties :
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L’identification et la caractérisation des élevages les meilleurs techniquement à partir des bases de données de GTE et GTTT ;
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La description de la structure, du fonctionnement, des pratiques et de l’évolution des élevages excellents à partir des informations recueillies par enquête postale ;
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L’étude des trajectoires d’élevages sur les dix dernières années pour décrire la dynamique du progrès technique ;
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L’analyse des données comptables permettant de (i) situer les moyens mis en œuvre par rapport au niveau technique obtenu (investissement, travail, capital), (ii) évaluer dans quelle mesure l’excellence technique se traduit par un meilleur revenu.
Les élevages excellents techniquement ne diffèrent pas tellement des autres en termes de structures ; certes, ils sont un peu plus grands en moyenne, et un peu plus localisés en Bretagne, mais on observe aussi de petits élevages (58 truies présentes pour le plus petit) parmi les meilleurs, et de nombreuses régions sont représentées. Les différences sont aussi limitées concernant les pratiques ayant un effet potentiel sur les performances techniques. Nombre de bonnes pratiques ont déjà diffusé dans la population et ont été adoptées par la majorité des élevages français, au point de devenir la norme. Mais les meilleurs élevages mettent en œuvre des pratiques de surveillance rapprochée des animaux : détection des chaleurs dès le lendemain du sevrage, surveillance des mise-bas, tri des animaux par poids ou par sexe, pesée des animaux, conduite alimentaire…
L’excellence technique est d’abord une question d’hommes. Les éleveurs les meilleurs techniquement présentent des caractéristiques, des profils, des « styles » spécifiques. Ils sont plus formés que la moyenne, ont développé des compétences pluridisciplinaires (techniques, économiques, sociales…) et une maîtrise de tâches très techniques qu’ils internalisent : auto-renouvellement des truies, prélèvement de la semence à la ferme, contrôles échographiques… Ces caractéristiques traduisent un attrait et des compétences personnels de ces éleveurs pour la technicité mais aussi des motivations économiques liées à la rentabilité des investissements en matériel (fabrique d’aliments à la ferme, laboratoire de fabrication des doses de semences, matériel de pesée…) ou en travail.
Les producteurs d’un très bon niveau sont toujours en recherche d’amélioration de leurs performances. Pour le groupe des « suiveurs », la course est d’autant plus difficile. Pour garder de la rentabilité, ils doivent rester dans la course technique et au minimum dans le peloton sans trop décrocher. Pour atteindre le groupe d’excellence, le challenge, sans être impossible, exigera d’accélérer la progression sur plusieurs années.
Le positionnement d’une exploitation à un niveau d’excellence technique ne relève pas du hasard. Une grande partie des exploitations concernées étaient déjà d’un bon niveau il y a 10 ans et l’écart semble se creuser ces dernières années. L’excellence technique, malgré les charges de structure plus élevées qui l’accompagnent (main-d’œuvre salariée, amortissements), se traduit par un résultat économique nettement supérieur. Il permet une dynamique d’investissement considérablement plus soutenue que la moyenne et une meilleure rémunération du travail de l’exploitant, enclenchant un cercle vertueux de progrès. Car même pour les meilleurs élevages, des voies de progrès demeurent. Certaines pratiques peuvent être améliorées : pesée plutôt qu’évaluation à l’œil du poids des animaux, tri systématique des petits porcelets… Des tâches répétitives restent à automatiser : 19% des élevages les meilleurs techniquement distribuent encore manuellement l’aliment en post-sevrage. Des aménagements nécessaires, comme l’installation de sas d’entrée avec douche obligatoire, amélioreront le sanitaire.
79 pages
Fiche technique
Titre :
L'excellence technique en élevage de porcs en France. Facteurs de réussite et conséquences économiques
Date sortie / parution :
2012